LA CABANE DES DIX

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Par Jean Jacques Théorêt

LA CABANE DES DIX

M. Claude Brunet, qui résidait au lac Sylvère, détenait un permis d’exploitation d’érablière sise sur une partie des lots 4, 5 et 6 du rang X, Canton Lussier à Saint-Donat, il louait ce site du Ministère des Terres et Forêts. Suite à des discussions avec des amis intéressés par le temps des sucres, ils se sont réunis afin de dresser les bases d’une convention en vue d’exploiter une érablière sur ce site.

La Cabane des Dix a été crée et dix membres en faisaient partie : Messieurs Raymond Bélanger, Albert Viau, Roméo Lorrain, Gérard Delisle, Réal Boulianne, Léo Chatel, Yvon Dubois, Roger Wolfe, Jacques Favreau, Lucien Bélanger, avec comme mission que la nature et l’esprit de l’aventure commune ne soient pas changée et demeure à but non lucratif.

Le coût des opérations serait partagé à part égale et les bénéfices et la plus-value (s’il y avait lieu) s’accroîtrait à part égale.

En décembre 1984, le permis détenu par M. Brunet a été transféré au nom de la Cabane des Dix, au soin de M. Roméo Lorrain. La participation des membres a été fixée à $1000. chacun.

La superficie des lots sous permis était de 21.8 hectares avec une possibilité de 6000 entailles, 4.5 hectares étaient exploités pour environ 1000 entailles.

Bien sûr les installations devaient être mises en place : déboisement afin de construire une cabane, achat d’un évaporateur, d’un réservoir, de tubulures, de quelques chaudières (afin de respecter la tradition), d’une pompe, installer l’électricité, creuser un puits de surface, tracer des chemins dans l’érablière, etc.
Lors de la première année d’exploitation en 1978, on avait environ 600 entailles sur tubulures et 150 avec chaudières.

La première ‘’bouillotte’’ a permis de faire 6 gallons de sirop d’érable dans la journée. Le sirop était entreposé dans la cabane et on s’assurait que tout était en ordre et on fermait les portes à clé pour revenir le lendemain.

Malheur, un incendie s’est déclaré durant la nuit et tout a été détruit. On a dû tout recommencer.

On travaillait en professionnel. A tous les jours, dans un cahier de bord, on inscrivait les tâches accomplies, les problèmes rencontrés, les corrections apportées, la production de sirop de la journée, ainsi que les personnes qui avaient effectué ces tâches. Un cahier de procédures était établi indiquant les étapes à suivre pour l’opération de la pompe, de la pression dans les tubulures, de l’évaporateur, etc. le tout s’effectuait en bonne camaraderie.

En janvier, à chaque fin de semaine, on commençait en motoneige à passer le grattoir dans les chemins de l’érablière afin qu’ils soient bien tapés pour faciliter la circulation lors de l’entaille des érables.

En février on vérifiait l’état de toutes les tubulures. Il faut mentionner que les petits amis ‘’les écureuils’’ aiment bien grignoter les tubulures. Il fallait donc s’assurer qu’elles n’étaient pas perforées.

On devait aussi replacer la cheminée qui avait été enlevée pour ne pas qu’elle soit endommagée par les chutes de neige ou de glace. On devait enlever la neige autour de la cabane, du cabanon ainsi que du ‘’pump house’’.

En mars, il était temps de penser à refaire les entailles pour les tubulures, installer les chalumeaux pour les entailles avec chaudières, on devait aussi s’assurer que le fil chauffant installé dans la tuyauterie venant des réservoirs jusqu’à l’évaporateur était bien fonctionnel. Le nettoyage des pannes de l’évaporateur et l’approvisionnement de bois à l’intérieur de la cabane faisaient partie des tâches à accomplir.

On attendait les premières coulées. Une nuit avec une température sous zéro et une journée ensoleillée avec une température au-dessus de zéro, une pompe fonctionnelle pour recueillir la sève, vider les chaudières à la fin de la journée et voilà nous étions prêts à faire bouillir la sève d’érable. On déposait un morceau de lard et on versait du lait pour empêcher que l’écume dans l’évaporateur ne déborde. Un flot continue d’eau d’érable et un feu régulier permet d’obtenir un bon sirop.

Lorsque Pâques arrivait, déjà une bonne quantité de sirop était accumulé, il était alors important d’inviter les familles pour un bon repas à la cabane à sucre. Sous l’œil attentif de Paul Viau, ‘’chef émérite’’, les invités se régalaient. En général, on accueillait une quarantaine d’invités. En 1999, tel que mentionné dans le livre de bord, on pouvait compter 41 adultes et 8 ½ ….. enfants pour le dîner.

Mentionnons qu’en plus des partenaires de La Cabane des Dix, des amis venaient donner un coup de main, que ce soit pour vider les chaudières, faire bouillir, entrer le bois etc.

La température se réchauffant, le ruisseau près de la cabane se met à couler et après avoir installé une pompe on peut alors s’approvisionner en eau pour le nettoyage des pannes et des tubulures.

En 1995, la production de sirop avait été de 185.5 gallons, alors qu’en 1998 on avait produit seulement 80 gallons de sirop. Le début et la fin de la saison des sucres varient, le tout est attribuable à la température. En 1996, la saison des sucres se terminait le 29 avril. En 1998, les coulées avaient débuté le 28 février.

A la fin de la saison, on enlevait les chaudières, les chalumeaux, nettoyait les chaudières ainsi que les tubulures, nettoyait et rangeait l’intérieur de la cabane, enlevait les pompes etc. C’était alors le repos des guerriers. Le sirop produit durant la saison était équitablement réparti entre les propriétaires et les amis ayant contribué.

Fin septembre, début octobre, avec la belle température, on effectuait les réparations nécessaires ainsi que la peinture, le rangement du bois dans l’abri, identifiait les érables qui devaient être coupées. Plus tard, on bûchait, fendait et cordait le bois.

A l’automne, une petite fête aux homards et aux huîtres s’imposait. La participation du chef Jean- Marc Thouin était très appréciée. On invitait les familles et les amis qui avaient aidé durant la saison.

Au fil des années, d’autres personnes se sont jointes à l’équipe tels que Paul Viau, Yvon Dubois, André Noiseux, Jean-Denis Délisle, André Lalande et Régis Comeau en remplacement de ceux qui avaient quitté.

L’aventure a cessé en 1999. Les installations ont alors été vendues à Dominion Grimm et par la suite revendues.

Le nouveau propriétaire, M. Martin Pilette, a agrandi le territoire de l’érablière et exploite maintenant 8300 entailles.

Pour ce faire, il a dû installer de nouveaux équipements, il a informatisé l’ensemble de l’érablière, ce qui permet une gestion à distance. La sève récoltée au lac Sylvère est acheminée par camion citerne à Notre-Dame-de-la-Merci, à l’érablière O’Maple.

En plus de faire bouillir l’eau d’érable récoltée au lac Sylvère, O’Maple ajoute sa propre production provenant de trois sites différents pour un total de 78,000 entailles. Plusieurs aspects ont été étudiés afin de prendre cette décision. Une seule personne est en charge de faire bouillir. Le goût du sirop est semblable pour l’ensemble de toutes ces entailles. Le regroupement de la production de sirop du lac Sylvère et de O’Maple permet une économie d’achat d’équipement, réduit le coût du transport du sirop à l’entrepôt, facilite la vente de la production, demande moins de main-d’œuvre.

La production de sirop des 8,300 entailles du lac Sylvère est d’environ 30,000 livres soit un peu plus de 2,200 gallons.

Les municipalités de Saint-Donat et Notre-Dame-de-la-Merci ont un grand potentiel d’érablières. La région se situe au 3e rang du potentiel d’érablières sur les terres publiques. La région pourrait exploiter jusqu’à 2,000,000 d’entailles. Il faut mentionner que l’aménagement des érablières a changé avec les années. Des coupes de jardinage gardent une variété d’essences, afin de conserver un couvert végétal, contrairement à ce qui se faisait auparavant lorsqu’on ne conservait que les érables.

Il y a présentement dans la région de Saint-Donat, Notre-Dame-de-la-Merci et St-Côme 4 grands producteurs de sirop d’érable soit : M. Martin Pilette, O’Maple (Alan Bryson et Tommy Riopel), Sirop Cabine (Manon Mapp et Timothy Jensen), et M. Guy Breault .

Sources : M. Réal Boulianne
M. Léo Chatel
M. Martin Pilette