Les Joyeux Lurons ( 02 )

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Les Joyeux Lurons

Avant de lire cet article, j’aimerais que vous repreniez mon texte du mois dernier. Repensez à Steve et à Thierry et placez-les avec les trois derniers protégés de Gilbert Cardinal, car ce serait les blesser et les tourmenter que de les séparer.

Parlons maintenant de Karine Lavoie qui a été la camarade de classe de Steve et de Thierry tant au primaire qu’au secondaire. Elle a un beau petit bébé maintenant, alors elle s’en occupe beaucoup avec l’aide de sa mère, mais les activités avec Les Joyeux Lurons lui tiennent toujours à coeur.

Pierre Miron, lui, a toute une expérience de vie. Il avait besoin d’hémodialyse à tous les deux jours, mais il vient d’avoir un nouveau rein. Tout juste sorti de l’hôpital, autonome, vaillant et fort de son amitié avec Pierre Lavoie que je vous présente bientôt, il a commencé à se joindre aux activités avec une sortie au ruisseau de la Fée, une randonnée en forêt d’environ 2 kilomètres.

Pierre Lavoie, c’est le numéro 99, le Wayne Gretsky des Joyeux Lurons. Vous le connaissez sûrement ; il marche sur la rue Principale tous les jours, son Journal de Montréal sous le bras comme les Français apportent leur baguette. C’est qu’il connaît ça le sport, notre Pierre, et il aime en parler comme il aime raconter à nouveau toutes les blagues de Michel Beaudry. Il m’informe d’ailleurs que ce dernier a donné une conférence bénévole à Joliette. Lui et Pierre Miron avaient en quelque sorte leur « ligue du vieux poêle » au garage d’Yves Miron. Pierre est un homme affectueux, reconnaissant, avec un très bon vocabulaire. Ses expressions si exactes, pointues même, m’impressionnent, et quand je le lui dis, il m’explique que sa maman était enseignante et que c’est pour cela qu’il aime tant leur activité du vendredi : faire, l’hiver, une bonne soupe chaude à être distribuée aux élèves de l’école et faire mijoter puis servir, au printemps, une sauce à spaghetti. Vous vous rendez compte ? À l’école même de sa mère. Si vous le croisez, saluez-le et parlez-lui des séries, du repêchage, de la vente récente du CH ou encore du refuge du Club de plein air de Saint-Donat qu’il a visité au lac Coutu. Merci champion.

Je voudrais tant prolonger cette chronique car je ne vous parlerais jamais assez des initiateurs et des bénévoles liés au groupe Les Joyeux Lurons. De tous les gens de notre communauté qui se sont impliqués et qui s’impliquent encore avec ferveur pour que des adultes souffrant de déficience intellectuelle deviennent des citoyens exemplaires, extrêmement utiles à la société. On parle énormément ces derniers temps de morale, de politique, de comportement stratégique responsable. Je pense alors, c’est bizarre je le sais, à cette chaîne de petites lumières autrefois bleues maintenant blanches que mes deux voisins, Luc et Édouard, ont posée entre leurs maisons pour qu’eux-mêmes, leurs enfants et petits-enfants ne fassent pas de faux pas la nuit tombée, en hiver comme en été. J’ai toujours eu le goût d’aller la suivre, juste pour voir, mais je n’ai pas osé bien sûr.

Disons que je fais un lien avec la chaîne humaine qui, les bras en parenthèses, protège Steve, Thierry, Karine et les deux Pierre, en hiver comme en été. Jacques Angers et Daniel Hardy, dont les Lurons disent « qu’ils sont pas gênants, qu’ils jasent vraiment avec eux et se montrent toujours disponibles, patients, généreux ». On sait qu’on a besoin de se faire aider, mais nous aussi ça arrive qu’on a des idées. Eux, ils sont capables d’acheter les idées des autres. Ils sont smattes et comiques en plus. J’ai pas besoin d’expliquer, c’est écrit dans leur face ». (Steve). Les dames cuisinières du vendredi qui sont aussi de très grandes complices : Josée Marchiori, Linda Desormeaux et Gertrude Nielly. Gregory Burin leur copain psychoéducateur, Danielle Séguin et Jean Désy, deux amis qui, toute leur vie, ont offert aux autres ces valeurs que sont l’estime de soi, le sentiment de dignité et, soyons plus terre à terre, le plaisir de l’aventure sur un voilier au gré des humeurs du lac Archambault. La Boulangerie Saint-Donat et le Centre de ski Mont Garceau qui offre chaque semaine l’équipement requis et l’accès aux pistes. Je termine par le comité fondateur même : Louise Beaudry, Micheline Vallières, Gaston Joly et Gilbert Cardinal.

Mon fils Jean-Sébastien m’a dit l’autre jour qu’il y avait à Saint-Donat une sorte de microclimat affectif, social. Je le crois. Les gens que je viens de nommer – et j’espère ne pas en avoir oublié en ce qui concerne ce dossier – sont tous capables sous la gouverne légère, souriante mais très ferme de Gilbert Cardinal, de concevoir et d’actualiser divers services et programmes, adaptés, continus, interdisciplinaires et de qualité en complémentarité avec beaucoup de partenaires du réseau social. « Ajoute gouverne séduisante, j’en suis bien capable », m’a-t-il dit un jour en faisant
son épicerie. Je suis bien d’accord, il n’y a pas plus beau métier que celui d’éducateur, et tous ces bénévoles en sont, comme il n’y a pas de plus belles personnes que celles qui ont une noble passion et y sont fidèles.

Source : Journal Altitude, Nicole Lajeunesse